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Depuis dix ans, les capitaux étrangers phagocytent peu à peu les parts françaises au sein du football français de haut niveau. Sur les vingt clubs présents en Ligue 1 pour la saison 2022-2023, dix appartiennent à des investisseurs étrangers, et ce chiffre est en passe d’augmenter.

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Le 21 juin, un communiqué de l’Olympique lyonnais (OL) officialisait le rachat du club de foot, historiquement propriété de Jean Michel-Aulas, par l’homme d’affaires américain John Textor. Ce dernier promet de sortir le portefeuille afin, notamment, de renverser l’hégémonie parisienne, affirmant en conférence de presse avoir « investi avec [ses] fonds propres ». Sur les 523 millions d’euros obtenus, Textor prévoit déjà d’injecter 86 millions à l’approche du mercato estival. Le détail de la répartition du reste de la somme devrait être annoncé durant l’assemblée générale du club, le 29 juillet. M. Aulas devrait rester à la présidence de l’OL pour les trois prochaines saisons, mais il n’en est désormais plus l’actionnaire majoritaire.

Ce rachat s’inscrit dans un schéma qu’on observe depuis maintenant dix ans dans le milieu du football professionnel français : l’arrivée d’un riche investisseur étranger montant au capital d’un club pour en prendre la présidence.

  • Performances financières ou sportives, diplomatie : des motivations de rachat diverses

En France, l’année 2011 est marquée par le rachat de deux des plus gros clubs de Ligue 1 par des investisseurs étrangers. Ils ont des poches profondes et comptent injecter des sommes d’argent jusqu’alors jamais vues dans le championnat français. En 2011, Colony Capital, actionnaire majoritaire du Paris-Saint-Germain, avec plus de 95 % des parts, perd de l’argent et fait face à un important déficit en matière d’image. Le fonds cède alors 70 % de ses parts à la société en participation qatarie Qatar Sports Investment. Le petit émirat use du soft power footballistique pour améliorer sa réputation. Au cours de la saison 2010-2011, le budget du PSG est quasiment doublé, passant de 80 à 150 millions, et n’a plus cessé d’augmenter depuis.

C’est également en 2011 qu’après plusieurs refus la principauté de Monaco cède deux tiers des parts de l’AS Monaco à l’homme d’affaires russe Dmitri Rybolovlev pour un euro symbolique. A l’époque, selon un administrateur du club monégasque, la famille princière ne souhaitait plus continuer à « financer totalement le club », dont les comptes étaient en mauvais état. Les investissements de l’homme d’affaires russe finissent par payer et transforment Monaco en un club de haut de tableau, dès son retour en Ligue 1 à la saison 2013-2014, durant laquelle le budget du club est augmenté de 100 millions d’euros.

  • Course à la surenchère budgétaire depuis dix ans

Si les budgets des clubs professionnels français ont augmenté au fil des ans, l’arrivée progressive des investisseurs étrangers a plus que doublé le budget moyen des clubs en Ligue 1, en passant de 52 millions d’euros en 2011 à 116 millions d’euros en 2022.

Aujourd’hui, les cinq premiers budgets de la Ligue 1 (Paris, Lyon, Marseille, Monaco et Lille) sont ceux d’équipes détenues par des investisseurs étrangers : américains, russes, luxembourgeois ou qataris. En 2022, les capitaux étrangers représentent trois quarts du budget total des clubs de Ligue 1.

Le football français professionnel subit une surenchère financière des investisseurs étrangers, à l’instar de la Premier League anglaise ou de la Serie A italienne, également convoitées par les capitaux étrangers. Encore impossibles il y a vingt ans, au moment des balbutiements du foot business, les écarts se creusent entre clubs d’une même division, à l’instar du géant PSG et ses 620 millions d’euros face à l’AC Ajaccio – qui monte en Ligue 1 pour la saison prochaine – et ses 8,5 millions d’euros la saison dernière, bien qu’une augmentation relative du budget a été confirmée par le président du club. Le budget additionné des clubs de Ligue 1 en l’an 2000 était de 915 millions d’euros, contre près de 2,4 milliards d’euros la saison prochaine.

Ces sommes rendent de plus en plus difficile pour les petits clubs de tenir le niveau de compétition financière imposé. Ainsi, l’Angers SCO, en difficulté budgétaire et surveillé par les autorités financières du football français, devrait changer d’actionnaire majoritaire pour reprendre la gestion du club. Le 18 mai, Saïd Chabane a annoncé à ses salariés qu’il céderait ses parts, probablement au groupe d’investissement américain GFC, pour un montant se situant, selon L’Equipe, entre 65 et 75 millions d’euros.

  • Racheter un club, un investissement à risque

La reprise des clubs français par des capitaux étrangers suit depuis dix ans le même schéma : rachat d’un club en baisse nette de performance (PSG, Bordeaux…) ou en mauvaise situation financière (Angers, Monaco…) pour le faire monter dans les classements.

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Ces rachats ne sont pas des placements sûrs pour les investisseurs, mais bien des paris sur l’avenir des clubs, comme ce fut le cas pour les Girondins de Bordeaux qui, malgré un important apport financier injecté très récemment, n’ont pas réussi à se maintenir dans l’élite. En revanche, les 100 millions d’euros de revenus que le PSG a touchés lors de la saison 2010-2011 se sont transformés en 556 millions pour la saison 2020-2021 sous la direction du président du club, Nasser Al-Khelaïfi, sous forme de droits télévisuels, de revenus de billetterie et de vente de produits dérivés.

Si les capitaux étrangers, manifestement conquis par le football français, ne cessent d’affluer depuis une décennie pour racheter des clubs professionnels hexagonaux, les investisseurs français se désintéressent des clubs sportifs étrangers. L’OL Groupe a bien acquis, sous l’ère Aulas, le club de Seattle, dans lequel évolue le Ballon d’or féminin 2019 Megan Rapinoe, mais le groupe est désormais la propriété de l’américain John Textor.

Matthieu Vlassoul

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